Comment les géants de la tech transforment le marché de l’emploi en course d’obstacles

Dans le monde merveilleux des ressources humaines, où les recruteurs sont des gourous et les candidats des gladiateurs, certaines entreprises se sont érigées en championnes du marketing RH, inventant la légende moderne des soft skills.

Google, Salesforce, Zappos et consorts sont devenus des adeptes de cette philosophie qui prône des collaborateurs aussi talentueux qu’agréables, à la fois inventifs, dociles et surtout, alignés comme des planètes dans le cosmos culturel de l’entreprise. Mais, une fois le rideau tombé, ces discours enrobés de bienveillance masquent une réalité simple : l’entreprise moderne veut la perle rare – et elle la veut à moindre coût. Voyons comment ce mythe doré crée des attentes irréalistes, de la concurrence acharnée, et, disons-le, quelques frustrations bien légitimes.

Les soft skills : La cerise sur le gâteau… ou le gâteau lui-même ?

Les soft skills – adaptabilité, communication, empathie, travail d’équipe – sont certes des qualités intéressantes, mais les recruteurs semblent les avoir élevées au rang de Graal professionnel. Or, soyons honnêtes, ces qualités seules ne sauveront jamais un projet informatique. Pour Google ou Salesforce, la réalité est plus terre à terre : ils recherchent des experts ultra-compétents, mais dans la description de poste, c’est en bonus s’ils savent aussi « naviguer dans la complexité relationnelle ». Mais attention, pas seulement avec un manuel de poche : ils veulent un maître Jedi de l’écoute active et du feedback constructif.Le paradoxe ? 92 % des recruteurs affirment que les soft skills sont aussi importantes, voire plus importantes, que les compétences techniques (selon LinkedIn en 2019). Cependant, on n’a encore jamais vu Google embaucher un analyste de données uniquement parce qu’il maîtrise l’art du small talk autour de la machine à café. En réalité, 89 % des échecs d’embauche seraient dus à un manque de compétences comportementales, et pourtant, les entreprises continuent de rechercher des « experts » avec une liste interminable de prérequis techniques. Vous voyez l’incohérence ? Les candidats, eux, la voient, et elle les pousse à accumuler certificats, formations, et autres parchemins… tout ça pour peut-être finir recalés parce qu’ils n’ont pas le sourire de la publicité Colgate.

Les attentes élevées : une compétition plus féroce qu’un épisode de Squid Game

Le problème avec ces géants, c’est qu’ils dictent des tendances qui rejaillissent sur tout le marché de l’emploi. Comme les modes alimentaires, il faut être « healthy » pour plaire. Toutes les entreprises suivent : elles augmentent leurs exigences, espérant recruter leur propre “Googleur” en herbe. Les candidats, eux, n’ont plus qu’à s’accrocher. Et comme dirait l’autre : may the best résumé win.Le rapport de la Harvard Business School, Dismissed by Degrees, révèle ainsi que la demande pour des diplômes dans des postes où ils n’étaient pas requis a augmenté de 33 % entre 2010 et 2018.

Imaginez que demain, les boulangeries exigent que tous les boulangers aient un doctorat en biochimie des levures pour mieux « s’aligner » avec leurs valeurs artisanales. À force de faire grimper les attentes, les entreprises finissent par se plaindre de la pénurie de talents – une rareté artificielle, créée par leurs propres critères exagérés.

Une loyauté sans bornes : La culture d’entreprise ou la secte des startups ?

Si les soft skills sont la cerise, la loyauté est le gâteau. Chez Zappos ou Amazon, il ne s’agit plus de fidélité mais de dévotion quasi-religieuse. On parle ici de valeurs « non négociables » – l’obéissance, pardon, l’adhésion totale à la culture. Pour Zappos, par exemple, si un nouvel employé n’est pas aligné, il peut partir, prime en poche. « Pas de déviants dans nos rangs ! » aurait-on presque envie d’entendre.

Selon une étude de la Society for Human Resource Management (SHRM), 94 % des entreprises estiment que la culture d’entreprise est essentielle au succès. Mais attention : 28 % des employés dénoncent l’utilisation de la culture comme prétexte pour exclure ceux qui n’ont pas les mêmes opinions, et 32 % trouvent que cette loyauté exacerbée crée un environnement oppressant.

Le problème ? Cette demande d’adhésion frôle le fanatisme. Soyez « Googley », « Obsédé Client » ou partez – voilà le message implicite. Et comme dans toute secte bien organisée, ceux qui osent douter finissent ostracisés. À long terme, cette pression tue l’authenticité : pour éviter d’être mal vus, les employés se conforment, au détriment de leur propre personnalité.

Un effet boule de neige sur le marché de l’emploi

Le modèle de la « culture d’entreprise », jadis propre aux startups de la Silicon Valley, est désormais reproduit dans toutes sortes de structures, des PME aux multinationales. Malheureusement, elles n’ont ni les moyens ni les processus pour véritablement intégrer cette culture de manière saine.

C’est un peu comme si chaque petite pizzeria de quartier voulait se donner des airs de restaurant étoilé en dressant les tables avec des nappes blanches et des plats aux noms en italien. Sauf qu’au lieu d’une meilleure qualité, cela mène à des critères de recrutement irréalistes, à des entretiens interminables, et à une désillusion générale.D’après le Candidate Experience Report de Talent Board (2021), 53 % des candidats se disent découragés par les processus de recrutement longs et jugent les attentes des entreprises souvent « irréalistes ». Cette compétition acharnée réduit la diversité des profils, puisqu’en forçant tous les candidats à se conformer aux mêmes attentes élevées, les entreprises perdent des talents aux parcours atypiques.

Le mythe des soft skills et l’urgence de remettre les pieds sur terre

Au final, il est temps de dissiper ce brouillard épais. Derrière la « priorité aux soft skills », ces entreprises n’ont jamais eu des attentes aussi strictes, et le marché de l’emploi n’a jamais été aussi impitoyable. Comme l’explique une étude McKinsey de 2020, les entreprises qui misent sur une culture homogène au détriment de la diversité constatent une perte d’innovation. Loin d’améliorer le climat de travail, ce modèle crée un environnement lisse et rigide, souvent aux dépens de la créativité.Alors, chers recruteurs, un peu de bon sens ne ferait pas de mal. Cessons d’idolâtrer la « culture d’entreprise » et les soft skills comme si chaque embauche devait être une mission divine. Peut-être qu’en redéfinissant les attentes de manière honnête et en recherchant des compétences techniques tout en valorisant réellement la diversité des profils, on éviterait que chaque candidature ressemble à un parcours du combattant, et que les entreprises cesseraient d’être déçues par des candidats qui ont été, dès le départ, poussés dans une compétition absurde.

Dare, grow, Rise and change the Game !

Call me Sonnye,

Coach and Player

—Sources1. LinkedIn Global Talent Trends 2019 Report2. Ibid.3. Harvard Business School & Burning Glass Technologies, “Dismissed by Degrees” (2019)4. Society for Human Resource Management (SHRM), Workplace Culture Report 20205. Ibid.6. Talent Board, Candidate Experience Benchmark Research Report (2021)7. McKinsey & Company, “Diversity Wins: How Inclusion Matters” (2020)


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